La première année de la vie de Youna, je n’avais pas encore conscience de ses problèmes moteurs. Je me suis focalisée sur sa déficience visuelle et je voulais comprendre….mais je ne comprenais rien…..enfin plutôt, il n’y avait rien à comprendre, il fallait juste : ATTENDRE

Mes mécanismes de défenses sont essentiellement « l’action », j’ai donc cherché une aide dans la déficience visuelle et j’ai trouvé, l’Institut des Jeunes Aveugles (IJA) de Lille.

Je me souviens de notre découverte de l’IJA à Lille !!! Nous avons par la même occasion découvert cette belle ville.

Nous avons commencé la prise en charge en août 2015, nous vivons encore à Amiens. Un mardi matin sur 2 nous faisions les 100 km et 2h de route (les bouchons du matin) pour nous ressourcer dans le monde de la déficience visuelle.

Une prise en charge précoce

Un grand merci à Béatrice Henn, directrice de l’IJA, qui a accepté de répondre à mes questions.


Que propose l’IJA comme dispositif d’accompagnement pour enfants déficients visuels

L’IJA, Centre d’éducation sensorielle pour enfants déficients visuels accompagne 160 enfants de la naissance à l’âge de 20 ans, en service à domicile ou en unités d’enseignements externalisées. Le SESSAD comprend deux sites celui de ST André lez Lille et celui de ST Omer. Le Centre peut effectuer des prises en charge en école ou collège ou dans ses locaux de Lille (Rue Royale)

L’établissement s’est organisée en dispositif d’accompagnement et les projets y sont personnalisés c’est à dire adaptés aux besoins des enfants et aux souhaits des familles.

Vous trouverez plein d’informations, d’actualités complémentaires sur le site internet de l’IJA.

Le Multi-Accueil : dispositif d’accueil et d’accompagnement 0/6 ans

Le multi accueil constitue une solution de proximité et un service relais avec les structures d’accueil petite enfance, en milieu ordinaire ou en milieu spécialisé (si l’enfant présente des difficultés associées).

L’IJA propose un accompagnement à la carte, un mode de prise en charge individuel ou collectif, une scolarisation adaptée.

Selon vous la prise en charge précoce est-elle importante, pourquoi ?

L’éducation précoce est nécessaire voire primordiale, pour le jeune enfant déficient visuel afin de pallier la vue déficiente, de développer les autres sens et d’accompagner les parents dans cet éveil sensoriel.

Comment avez vous connaissance des enfants qui pourraient bénéficier de vos services ?

Parents, services sociaux, médecins, services hospitaliers CAMSP etc…

Quelles sont les démarches à entreprendre pour inscrire son enfant ?

Prendre contact pour un RV avec un chef de service (Rémi BRAAT)

Puis bilan médical avec l’ophtalmologiste et l ‘orthoptiste, si la déficience visuelle est confirmée , un dossier MDPH sera constitué (aide possible par l’assistante sociale)

Une équipe pluridisciplinaire

Medecins ophtalmo et psychiatre

Chef de service

Personnels spécialisés pour enfants déficients visuels et formés dans le domaine de la petite enfance

Psychologue

Enseignant spécialisé

Educateur spécialisé

Orthoptiste (rééducation basse vision)

Orthophoniste

Psychomotricien

Ergothérapeute

Assistante sociale

Jennifer, une éducatrice au top !

Voila Jennifer, c’est la personne qui regarde Youna sur la photo du début d’article ! Je n’ai rien à ajouter la photo parle d’elle même, juste « MERCI ».


Quelle est votre formation ?

Je suis éducatrice spécialisée. J’ai un DUT carrières sociales, le diplôme d’état d’éducateur spécialisé et une licence en sciences de l’éducation. Je suis en cours de VAE pour obtenir également le diplôme d’éducatrice de jeunes enfants.

Depuis combien de temps travaillez vous à l’IJA ?

J’ai fait mon stage de fin d’étude à l’IJA à partir de 2008. C’est un stage qui a duré 9 mois. J’ai rédigé mon mémoire sur l’accompagnement de l’enfant atteint de déficience visuelle et les techniques de compensation mis en place. J’ai eu la chance ensuite d’y travailler en qualité d’éducatrice spécialisée assez rapidement après l’obtention de mon diplôme en 2009.

Avez vous une spécialité dans la déficience visuelle ?

Mon stage et mon travail de recherche de mémoire m’ont beaucoup apporté en termes de connaissances globales sur la déficience visuelle. Au début de ma carrière à l’IJA, j’ai travaillé en internat avec des enfants à partir de 6 ans. Je faisais également des interventions auprès des adolescents et des jeunes majeurs. J’ai eu de multiples missions qui m’ont permis d’enrichir ma pratique et d’affiner mon accompagnement. En 2014, on m’a permis de travailler auprès des plus jeunes. Avant d’entrer en formation d’éducatrice spécialisée, j’avais travaillé plusieurs années dans des structures petites enfances mais là j’étais confrontée en plus à la déficience visuelle. Il m’a fallu combiner plusieurs compétences. J’ai donc continué à me former sur le terrain, grâce à une très bonne équipe pluriprofessionnelle dans laquelle j’évolue mais également grâce aux familles et aux enfants que j’accompagne. Je continue à lire des livres spécialisés, à me tenir au courant des avancées dans le secteur de la déficience visuelle et de l’accompagnement précoce. J’ai également pu bénéficier de plusieurs formations (stimulation visuelle basse vision, participation à des colloques sur la petite enfance, etc.). Aujourd’hui je peux dire que je suis spécialisée dans l’accompagnement précoce de l’enfant malvoyant ou non voyant avec ou sans troubles associés.

Que proposez vous à un tout petit présentant une déficience visuelle ? 

Chaque situation est différente. Mes objectifs diffèrent en fonction des enfants, de leur histoire, de leur contexte de vie. Je travaille beaucoup avec les parents. Pour moi c’est la base de mon travail. Créer la relation avec l’enfant et sa famille. Comprendre ce qu’ils attendent de nous et tenter de répondre à leurs besoins en toute bienveillance, sans jugement. Quand je fais connaissance avec l’enfant, je veux qu’il soit en confiance, on joue ensemble avec des outils adaptés à sa situation. Par exemple je sollicite le potentiel visuel d’un enfant malvoyant avec du matériel contrasté, des lumières, j’utilise la salle noire dont nous bénéficions. Je cherche à lui faire optimiser sa vision même si ce n’est pas son sens premier. Je l’amène, de façon ludique, à prendre confiance en lui et en ses capacités dans son environnement, dans la relation à l’autre. Pour un enfant non voyant, l’objectif principal est de lui montrer comment découvrir son environnement à travers ses sens compensatoires (le toucher, l’ouïe, le sens des masses,…), mettre des mots sur des objets, les détailler verbalement, tactilement. Le but est d’affiner sa perception de ce qui l’entoure. Le développement tactile est primordial et progressif. C’est un accompagnement sur plusieurs années en collaboration permanente avec les familles. Je pose les bases pour l’apprentissage du braille qui sera fait ensuite par l’enseignante spécialisée. En parallèle, je construis le projet de l’enfant avec la famille (préparation à l’inclusion, partenariat avec des services ou établissements médico-sociaux). C’est une projection dans l’avenir à court et moyen termes.

Mais je ne travaille pas seule, nous sommes toute une équipe (psychomotricienne, orthophoniste, orthoptiste, psychologue, enseignante spécialisée et assistante sociale). On se nourrit chacune de nos points de vue, on plante notre petite graine dans chaque situation. Selon moi cette démarche pluridisciplinaire nous permet de mieux répondre aux besoins multiples des enfants qu’on accompagne et d’individualiser au mieux nos accompagnements. En tout cas j’essaie du mieux que je peux.

Quels conseils donneriez vous à des parents qui apprennent que leur enfant est déficient visuel ?

Chaque parent se souvient du moment où le diagnostic a été prononcé. C’est un traumatisme. Les parents sont abattus et c’est légitime. La découverte du milieu spécialisé est également douloureux au début mais après ça rentre dans une routine. Je conseille vivement aux parents de rapidement faire les démarches pour que leur enfant soit accompagné par des professionnels. C’est bénéfique pour l’enfant mais aussi pour les parents. Plus tôt l’enfant est suivi et moins il y a de complication par la suite. De plus le soutien des professionnels peut aider à cheminer, à se projeter vers l’avenir. On commence le suivi dès le plus jeune âge et c’est très important. Il ne faut pas attendre l’arrivée à l’école car les démarches administratives peuvent être longues également. Bref, n’ayez pas peur, vous serez toujours les seuls décisionnaires car vous êtes les parents et personne ne peut vous remplacer.

La prise en charge exemplaire de l’IJA pour Youna

Puis grâce à une équipe à l’écoute, experte et efficace nous avons décidé de déménager à Lille et d’augmenter la prise en charge de Youna.

2016 / 2017 : démarrage tous les jeudi matin, puis on ajoute le vendredi matin

2017 / 2018 : 4 matinées avec 2 repas sur place.

2018 / 2019 : accompagnement IJA à l’IEM : éduc + orthoptie + péda adaptée + danse adaptée

2019 / 2020 : accompagnement IJA à l’IEM : éduc + péda adaptée (démarrage du braille)

Pour les parents aussi, des choses sont proposées, comme des regroupements avec plusieurs familles, des sorties, des groupes d’échange avec une psychologue…


En étant le plus objective possible, ce qui est vraiment intéressant dans ce service multi-accueil, c’est qu’il n’y a pas de prise en charge « type », l’équipe personnalise l’accueil de l’enfant et prend en compte son environnement, sa famille, ses priorités et surtout « voit les capacités de l’enfant et non ses incapacités ».

Je profite de cet article pour leur dire merci du fond du cœur de nous avoir offert ce petit lieu de protection, de bienveillance, de conseils, de soleil.

Jennifer, Hélène, Perrine, Manon, Adeline, Anne Lise, Stéphanie, Blandine, Régine, Laurence, Mme Henn, M. Podevin, M. Bratt, ….il en manque, je ne vous oublierez jamais.

Votre présence, votre façon de vous adresser à Youna, à nous, nous ont donné la force de croire que sa vie allait être aussi belle et heureuse qu’elle le souhaiterait.

Bisous tout doux <3